La musique de l’ère baroque – les concertos pour piano de Bach et les sonates de Scarlatti – figure déjà dans le répertoire éclectique d’Alexandre Tharaud chez Erato.
Aujourd’hui, il nous offre son interprétation de l’un des monuments du répertoire pour piano (et clavecin), les Variations Goldberg de Bach. « Bach est le père de tous les compositeurs, il est celui qui a ouvert la voie. Lorsque je suis fatiguée, ou que je ne joue pas mon meilleur piano, je retourne à Bach. Il me recentre, il me donne une nouvelle force. Sa musique a un centre, mais n’a pas de fin … Pour jouer Bach, il faut se sentir en harmonie avec soi, se sentir humble – Bach en réalité est vraiment une affaire d’humilité … vous ne pouvez rien cacher. » confie Alexandre Tharaud.
Publiée en 1741, cette œuvre – qui dure un peu plus d’une heure – comprend 30 variations sur un air initial. A l’origine, Bach l’a appelé “Aria mit verschiedenen Änderungen” (thème avec diverses variations), mais son titre communément utilisé est un dérivé du nom du claveciniste (Johann Gottlieb Goldberg) du Comte Keyserlingk, mécène de Bach à Dresde. Cela a été écrit pour un clavecin à deux claviers, ce qui par conséquent exige une grande dextérité de la part du pianiste dans la technique contrapuntique. Il contient très peu de directions d’interprétation, donc dans l’ensemble cela représente un défi à la fois puissant et passionnant pour l’interprète.
Alexandre Tharaud s’est préparé à ce challenge en cessant les représentations pendant neuf fois. « En faisant une pause scénique, j’ai eu l’opportunité de travailler sans hâte, sans stress, sans me soucier des horaires. En tant que musicien, dans notre vie normale, nous devons toujours penser à un concert à venir que ce soit le jour suivant ou dans trois ans. J’ai eu le luxe de pouvoir examiner quelques notes sous tous les angles. C’est passionnant de pouvoir passer cinq heures dans un simple bar…. Peut-être est-ce une question de maturité – de prendre son temps, se questionner, être seul avec le piano et travailler sur son jeu… tel un archéologue, je creuse vers l’inconnu, je cherche. C’est pour cela que j’ai eu besoin d’arrêter quelques temps, et surtout de passer du temps hors des salles de concert. – Lorsqu’il est revenu à une routine plus conventionnelle, Alexandre Tharaud a planifié des groupes de quatre ou cinq représentations des Variations Goldberg à six mois d’intervalle, travaillant pendant tout ce temps à cet enregistrement qui a été réalisé en Février et avril 2015 à Aix-en-Provence.
Presque inévitable, l’esprit du pianiste canadien Glenn Gould (1932 – 1982) flotte autour de chaque nouvel enregistrement des Variations Goldberg au piano : on lui attribue le fait qu’il a transformé les perceptions de la musique de Bach jouée sur des instruments modernes. Alexandre Tharaud confie que le premier CD qu’il a acheté lorsqu’il avait 15 ans était l’un des enregistrements des Variations par Glenn Gould. « Tandis que je pourrais me décrire comme un électron libre, Gould était lui un Ovni ! Personne ne joue comme lui et personne ne peut jouer comme lui … son jeu, sa réinvention de la musique créent une expérience totale que je trouve fascinante et j’ai beaucoup appris de lui. Les Variations Goldberg est un travail qui est renouvelé à chaque fois qu’il est enregistré. Généralement, je suis quelqu’un qui aime dépasser mes attentes, défier mes hypothèses – que nous parlions de mes goûts ou de la façon dont je vis – et les grands objets d’art changent votre vie. »