Fidèle à son désir de mettre en miroir des œuvres a priori très différentes, Renaud Capuçon confronte l’incandescence romantique du Concerto en ré majeur de Brahms avec le modernisme poignant du Concerto écrit « À la mémoire d’un ange » de Berg.
Il exauce ici un rêve de longue date : jouer avec l’orchestre Philharmonique de Vienne.
A ce rêve exaucé s’ajoute un une émotion particulière : c’est en effet la première fois qu’est publié un enregistrement du Concerto de Berg avec l’Orchestre Philharmonique de Vienne, pourtant dédicataire et créateur de l’oeuvre en octobre 1936. Une belle première pour le violoniste français !
Renaud Capuçon aime à mettre en miroir des œuvres appartenant à des périodes et des esthétiques radicalement différentes, afin d’en éclairer les correspondances musicales et émotionnelles. Ainsi, l’un de ses derniers enregistrements, en 2009, était-il consacré aux Concertos pour violon de Beethoven et de Korngold. Cette association du lyrisme romantique et de l’opulence hollywoodienne avait de quoi surprendre, et cependant le violoniste français a su imposer la cohérence de ce programme. La BBC Review saluait « un couplage magnifique et pertinent » qui apparaissait comme « des choix parfaits pour l’interprétation élégante et raffinée de Renaud Capuçon ».
Dans ce nouvel enregistrement, Renaud Capuçon a choisi de confronter deux concertos qui figurent au panthéon du répertoire austro-allemand : le Concerto en ré majeur op. 77 de Brahms et le Concerto écrit « À la mémoire d’un ange » de Berg. Véritable sommet du romantisme, considéré aujourd’hui comme un des plus grands chefs-d’œuvre de la musique viennoise du XIXe siècle, le Concerto de Brahms a été qualifié à son époque de « concerto contre le violon », tant la partie soliste en est redoutablement virtuose. Il fut créé en 1879 par le violoniste Joseph Joachim, que n’effrayait pas cette partition réputée injouable.
Composé en 1935, le Concerto de Berg est dédié à la mémoire de la fille d’Alma Mahler, Manon Gropius, qui venait de mourir à seulement 19 ans. Bouleversé par cette disparition, le compositeur a libéré son imagination et écrit une œuvre dans laquelle le dodécaphonisme de la Seconde École Viennoise est tempéré par un lyrisme mélancoliquement tonal, ainsi que par la citation d’un choral de Bach. Cette œuvre est d’autant plus poignante qu’elle peut être considérée comme le chant du cygne de Berg, qui mourut brutalement à la fin de cette même année. Créée en 1936 par le violoniste américain Louis Krasner, le concerto n’a pas été enregistré par l’orchestre depuis sa création.
« La collaboration avec Renaud Capuçon fut particulièrement heureuse pour nous. Nous ne pouvons que nous réjouir et profiter de l’apport de partenaires musicaux qui savent ce qu’ils veulent et savent nous le faire partager » dit Alexander Steinberger, le porte-parole de l’orchestre. « Le Concerto de Berg fait partie de notre culture, il est d’une grande exigence pour nous les Wiener Philharmoniker »
« J'ai longtemps rêvé de jouer avec le Philharmonique de Vienne qui est quand même l'un des plus extraordinaires orchestres au monde. », confiait Renaud Capuçon en 2011. Ce rêve de longue date s’est enfin exaucé avec l’enregistrement de ce disque, sous la baguette de Daniel Harding. Ce dernier a fait ses débuts avec l’orchestre viennois en 2004, alors qu’il n’avait pas encore trente ans, et a été maintes fois invité à le diriger depuis, ce qui lui a permis de développer de véritables affinités électives avec ses instrumentistes. Par ailleurs, il s’est distingué comme un grand interprète brahmsien. Renaud Capuçon a souvent professé son admiration pour le compositeur allemand, au point de s’avouer « complètement brahmsomaniaque » : « Chaque fois que je joue une de ses oeuvres, j’ai l’impression de faire un bout de chemin avec lui. Sa musique est extrêmement authentique et touche immédiatement ». Pour donner libre cours à cette passion, il s’est lancé dans une intégrale de la musique de chambre de Brahms, à la fois sur les scènes internationales, et plus particulièrement au Musikverein de Vienne, mais également au disque chez Virgin Classics.