Alessandro Scarlatti, Giovanni Bononcini, Nicola Antonio Porpora
Artistes présents:
Ils se sont rencontrés sur le plateau du déjà légendaire Sant’Alessio de Landi en 2007 où ils ont remporté un immense succès . La parution de ce disque est aujourd’hui l’occasion de réunir à nouveau cette dream team baroque : William Christie dirige avec raffinement extrême Philippe Jaroussky et Max Emanuel Cencic dans ce programme de duos du XVIIIe siècle.
Les deux contre-ténors ressuscitent ainsi l’âge d’or des cercles aristocratiques italiens où furent créées nombre de ces pièces aussi virtuoses que sensuelles.
Ce disque signe les retrouvailles de deux immenses artistes : Philippe Jaroussky, tout de grâce, Max Emanuel Cencic, timbre plus ambré. Avec des personnalités et des moyens différents, l’un et l’autre incarnent les deux facettes d’une même médaille : l’art des castrats, dont l’androgynie troublante se coulait avec une égale aisance dans les lamenti et les vocalises les plus virtuoses.
William Christie sait, comme nul autre, l’art des voluptés vocales.
C’est lui le premier qui a eu l’idée de les réunir sur le plateau du Sant’Alessio de Landi. Philippe Jaroussky s’y montrait touchant de juvénilité et de candeur dans le rôle-titre, tandis que Max Emanuel Cencic incarnait sa mère éplorée avec une profondeur émouvante.
Si les deux divi ont depuis chanté ensemble, partageant notamment l’affiche de L’Incoronazione di Poppea de Monteverdi ou de Faramondo de Haendel, jamais ils n’avaient eu l’occasion de marier leurs timbres dans un programme de duos. C’est désormais chose faite avec la parution de ce disque qui réunit à nouveau la dream team du Sant’Alessio : sous la baguette de William Christie, Philippe Jaroussky et Max Emanuel Cencic redonnent vie à ces duetti que composèrent les grands maîtres des XVIIe et XVIIIe siècles pour les cercles aristocratiques italiens.
Sur des textes très poétiques déclinant les charmes pastoraux d’une Arcadie perdue ou les déplorations plus tragiques d’amants désespérés, des musiciens tels que Scarlatti, Porpora, Bononcini ou Marcello ont composé des pièces intimistes qu’érudits et mondains s’empressaient d’aller découvrir dans les salons. Si nombre de ces pièces sont souvent considérées comme des miniatures particulièrement sophistiquées, elles n’en déploient pas moins une ampleur tout opératique qui exige de leurs interprètes une large palette de couleurs pour en illustrer les divers affetti, mais aussi un art du dire qui leur permette de phraser avec éloquence, ainsi qu’une infaillible virtuosité dans les coloratures. Le Vatican ayant interdit la représentation d’opéras sur les scènes romaines au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles, la composition de cantates représentait alors pour les compositeurs le seul palliatif à cette interdiction. La plupart de ces pièces furent d’ailleurs interprétées par les meilleurs chanteurs et instrumentistes de l’époque.
Loin des rivalités acharnées que pouvaient se livrer les castrats au XVIIIe siècle, et dont les éclats volontiers mélodramatiques ont contribué à façonner la légende, Philippe Jaroussky et Max Emanuel Cencic ont abordé ces duetti dans un esprit d’amitié et de connivence artistique. Plutôt que de s’opposer dans des joutes vocales démonstratives, les deux contre-ténors ont privilégié l’écoute réciproque à seule fin de faire triompher ce théâtre des sensualités poétiques. En grand orfèvre des alliages de timbre, William Christie cisèle des lignes mélodiques d’un grand raffinement, offrant à ses chanteurs un écrin instrumental où faire triompher la beauté étrange et fascinante de leurs voix.